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les hommes d’aujourd'hui

Sangs, « et ainsi, disait dernièrement Ghil, me jeta dans la voie, ma voie, selon un sens harmonique très développé en moi qui me fait écrire en compositeur plus qu’en littérateur ».

D’ailleurs, ce système, « cette voie », Ghil à son tour les a magistralement expliqués dans un libelle qui fit il y a quelque deux ans, un bruit du diable où il fallait, et campa superbement l’auteur en plein terrain à conquérir. J’entends parler de ce fameux Traité du Verbe, autorisé par un Avant-dire de Stéphane Mallarmé, où vinrent durant plusieurs mois de l’année dernière s’exercer les jeunes dents des loups en herbe du journalisme « littéraire » quotidien et de l’autre. Surtout la langue, charmante avec ses jolies inversions, que de parasites supprimés, et le savoureux emploi de mots triés entre mille choix exacerba les biles et les rates. C’en devint amusant, et les vérités n’en étaient pas moins dites, chacune d’elles précieuse, parbleu ! mais la préférée de l’auteur, celle en laquelle il avait mis toutes ses complaisances, éclata comme une fanfare dans l’air épais du béotisme particulier à l’an de grâce 1886 : à savoir, la théorie de l’Instrumentation poétique.

Partant de ce principe, admis en somme, qu’il y a parité entre les sons et les couleurs (Baudelaire et Rimbaud, génies, ont déployé l’idée émise par de nombreux théoriciens) pourquoi le Poète ne tradui-