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confessions

croix : « Au nom du Père, etc. » que suivait platement ceci : « Bénissez-nous, Seigneur, ainsi que la nourriture que nous allons prendre », au lieu du cordial et comme tangible « Nos et ea quæ sumus sumpturi benedicat Dextra Christi. »

C’est vrai que cette prière était à l’usage d’écoliers (dont plusieurs cependant étaient des rhétoriciens et des « philosophes » ), mais… lisez plutôt Chateaubriand au sujet du besoin qu’a l’humanité vis-à-vis des Puissances célestes d’un langage mystérieux où soient impliqués, dans l’hommage et dans la supplication qui n’en est d’ailleurs qu’un accessoire, les besoins inconnus d’elle-même, la pauvre humanité !

C’est à ce point vrai que même les Protestants anglais emploient dans leurs offices religieux, si beaux qu’ils en sont presque catholiques (moins la cordialité, bien entendu, l’intime et la révérence toute filiale), le vieux langage du temps d’Elisabeth et d’avant elle, presque ou plutôt tout à fait incompréhensible aux bonnes gens qui n’en psalmodient pas moins à l’église efficacement pour leur salut, n’en récitent pas moins le matin et le soir à leur chevet le Pater et le Credo dans les termes littéralement qu’employaient les premiers Puritains !

La soupe fut servie, combien médiocre au prix des consommés parentals ! du bouilli s’ensuivit, sec autant qu’était délicieusement entrelardé le bœuf