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FRAGMENTS

I


Dis, sérieusement, lorsque je serai mort,
Plein de toi, sens, esprit, âme, et, dans la prunelle,
Ton image à jamais pour la nuit éternelle,
Au cœur tout ce passé tendre et farouche, sort

Divin, l’incomparable entre les jouissances
Énormes de ma vie excessive, ô toi, dis,
Pense parfois à moi qui ne pensais jadis
Qu’à t’aimer, l’adorer de toutes les puissances

D’un être fait exprès pour toi seule t’aimer,
Toi seule te servir et vivre pour toi seule
Et mourir en toi seule. Ô oui, quand, belle aïeule,
Tu penseras à moi, garde-toi d’exhumer

Mes jours de jalousie et mes nuits d’humeur noire,
Plutôt évoque l’abandon entre tes mains
De tout moi, tout au bon présent, aux chers demains,
Et qu’une bénédiction de ta mémoire

M’absolve et soit mon guide en les sombres chemins.