Je prenais goût à cette parole animée, en dehors
et parfois, quand il s’agissait d’art au-dessus de
l’ordinaire, vibrante, et j’examinai avec le plus
vif intérêt cette tête ardente, ces pauvres yeux
malades, mais luisants d’un feu étrange, ces
traits à la fois fins et des plus marqués, le teint
d’une Espagnole et la chevelure presque d’une
mulâtresse, avec, comme principale originalité,
le grand front bombé, qui fut une beauté en
1830, et restait, sur cette tête toute de passion,
comme la marque souveraine de l’Intelligence.
Cette femme, déjà si intéressante par elle-même,
m’apparaissait en quelque sorte comme
la Muse du Romantisme, épousant jusque dans
ses excès, dont elle se rendait aussi bien compte
qu’elle en percevait ou en créait l’excuse, souvent
cruelle, les idées, les opinions, jusqu’aux
erreurs de son génial conjoint ; aussi, un peu,
comme la Consolatrice de l’exil, l’Inspiratrice,
aux moments de détresse morale et de lassitude
intellectuelle, du poète fatigué des luttes, le
plus souvent écœurantes, de la politique ;
comme l’Âme sympathique et l’âme altière,
souvent amère des tristesses de la vie… et de la
mort. Épouse, dit-on, parfois douloureuse, mère
par deux et trois fois éprouvée, et combien !
Grande figure émouvante au possible.
Comme j’en étais là, tout engagé dans une