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critique et conférences

donnèrent à réfléchir à ma belle-mère, la meilleure et la plus intelligemment tolérante des femmes pourtant, et il fut convenu qu’au moment de la rentrée de mon beau-père, en ce moment à la chasse, homme, lui, bourgeoisissime et qui ne supporterait pas un instant un tel intrus dans sa maison, « mossieu ! » on prierait quelques-uns de mes amis, qui avaient adhéré et aidé à la venue de Rimbaud à Paris, de le loger à leur tour et de l’héberger, sans pour cela, moi, me désintéresser de « l’œuvre », le moins du monde, bien entendu.

Une très forte amitié s’était formée entre nous deux durant les trois semaines environ qu’avait duré le passage chez moi de l’intéressant pèlerin.

De ses vers passés, il m’en causa peu. Il les dédaignait et me parlait de ce qu’il voulait faire dans l’avenir, et ce qu’il me disait fut prophétique. Il commença par le Vers Libre (un vers libre toutefois qui ne courait pas encore le guilledou et ne faisait pas de galipètes, pardon, de galimatias comme d’aucuns plus « modernistes »), continua quelque temps par une prose à lui, belle s’il en fut, claire, celle-là, vivante et sursautante, calme aussi quand il faut. Il m’exposait tout cela dans de longues promenades autour de la Butte et, plus tard, aux cafés du quar-