Page:Verlaine - Jadis et Naguère, 1891.djvu/76

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Ténébreux. Avouez votre cas tout à fait.
Le silence, n’est-il pas vrai ? vous étouffait,
Et l’obligation banale où vous vous crûtes
D’imiter à tout bout de champ la voix des flûtes
Pour quelque madrigal bien fade à mon endroit
Vous étouffait, ainsi qu’un pourpoint trop étroit ?
Votre cœur qui battait pour elle dut me taire
Par politesse et par prudence son mystère ;
Mais à présent que j’ai presque tout deviné
Pourquoi continuer ce mutisme obstiné ?
Parlez d’elle, cela d’abord sera sincère.
Puis vous souffrirez moins, et, s’il est nécessaire
De vous intéresser aux souffrances d’autrui,
J’ai besoin, en retour, de vous parler de lui !

Myrtil

Et quoi, vous aussi, vous !

Chloris

Moi-même, hélas ! moi-même
Puis-je encore espérer que mon bien-aimé m’aime ?
Nous étions tous les deux Sylvandre, si bien faits
L’un pour l’autre ! Quel sort jaloux, quel dieu mauvais