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souvenirs

II


Et toi, Pierrot noirouffe, avec ta longue face plutôt méchante pas trop que les femmes trouvent encore laide en attendant que tu les fasses souffrir, ô gosse comme prédit dans les Vocations du grand Baudelaire, souffrir et mourir d’amour et de coquetterie au fond, tu es gentil, tyran de ta cour, ta cour ou plutôt ton impasse, où tu domines en voix et en poings tes camaraux parfois beaucoup plus grands et forts que toi, mais jamais mieux mal embouchés.

Je t’aime bien parce que, dans ta rude et naïve façon, tu fus au fond très bon pour moi malade et pour moi convalescent et quand je te revois maintenant, un peu guéri moi, un peu grandi toi, c’est d’une foi instinctivement fraternelle, un brin goguenarde, pourquoi ? que tu me demandes si j’ai des cigarettes à te donner et ajoutes dans un zézaiement qui t’est naturel et que tu exagères faussement, et un grand geste emphatique qui m’est emprunté : « Ou un cigare, à la rigueur ! »

Et puis je t’ai vu pleurer quand ta mère était