cette partie essentielle de leur œuvre que nous avons laissé gaspiller leur héritage, et que nous n’en avons su garder qu’un vain souvenir.
« En vain, » disait Duport, l’auteur à peu près inconnu des rapports admirables de la Constituante sur l’organisation judiciaire, « en vain aurez-vous donné à cet empire une constitution libre et des lois justes, si la justice n’y est convenablement organisée. »
« De la bonne ou de la mauvaise organisation de la justice, » disait Thouret, « dépend la liberté individuelle de chaque citoyen, puisque c’est le pouvoir judiciaire qui doit garantir à chaque citoyen la jouissance de ses biens, de sa liberté personnelle, de son honneur et de sa vie. »
La première et indispensable condition d’une bonne organisation du pouvoir judiciaire, c’est qu’il soit complètement indépendant du gouvernement. « Il n’y a point de liberté, » écrit Montesquieu dans l’Esprit des lois, « si la puissance de juger n’est pas séparée de la législative et de l’exécutrice. Si elle était jointe à la puissance exécutrice, le juge pourrait avoir la force d’un oppresseur. »
C’est bien ce qui a lieu actuellement en France, un siècle après Montesquieu, quatre-vingts ans après la Révolution de 1789.