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port-clarence.

Angleterre, cherchant toujours à se rapprocher de l’Alaska, où il comptait rentrer dès qu’elle serait devenue américaine. Oui ! son secret espoir, c’était de revenir en Europe par la Sibérie, — précisément ce qu’avait projeté de faire et ce que faisait M. Cascabel. Que l’on juge ce qu’il éprouva, quand il apprit que cette famille, à laquelle il devait son salut, se disposait à gagner le détroit de Behring pour passer en Asie.

On comprend que son plus vif désir eût été de l’accompagner. Mais pouvait-il l’exposer aux représailles du gouvernement russe ? Si l’on découvrait qu’elle avait favorisé la rentrée d’un condamné politique dans l’empire moscovite, qu’arriverait-il ? Et, pourtant, son père était fort âgé, il voulait le revoir…

« Venez, monsieur Serge, venez donc avec nous ! s’écria Cornélia.

— Il y va de votre liberté, mes amis, de votre vie peut-être, si l’on apprend…

— Et qu’importe, monsieur Serge ! s’écria M. Cascabel. Chacun de nous a un compte ouvert là-haut, n’est-ce pas ? Eh bien, tâchons d’y apporter le plus possible de bonnes actions !… Ça balancera les mauvaises !

— Mon cher Cascabel, songez bien…

— Et d’ailleurs, on ne vous reconnaîtra pas, monsieur Serge ! Nous sommes des malins, nous autres, et que le loup me croque, si nous n’en remontrons pas à tous les policiers de la police russe !

— Cependant… répondit M. Serge.

— Et tenez… s’il le faut… vous prendrez l’habit de saltimbanque… à moins que vous n’ayez honte…

— Oh !… mon ami !…

— Et qui s’avisera jamais de soupçonner que le comte Narkine figure dans le personnel de la famille Cascabel !

— Soit, j’accepte, mes amis !… Oui !… j’accepte !… Et je vous remercie…

— Bon ! bon ! fit M. Cascabel. Des remerciements !… Croyez-vous