venez dire adieu à la cuisine turkomène, car nous serons bientôt réduits à la cuisine chinoise. »
L’offre est acceptée d’autant plus volontiers que la réputation des cuisiniers kachgariens est universellement justifiée, nous fait observer le major.
En effet, M. et Mme Caterna, le major, le jeune Pan-Chao et moi, nous sommes émerveillés et enchantés de la quantité de plats qui nous sont servis, et aussi de leur qualité. Les mets sucrés alternent capricieusement avec les rôtis et les grillades. Puis, ce que le trial et la dugazon ne devront jamais oublier, — pas plus, du reste, que les fameuses pêches de Khodjend, — ce sont certains plats dont l’ambassade anglaise a voulu conserver le souvenir, puisqu’elle en a consigné la composition dans le récit de son voyage : pieds de cochon saupoudrés de sucre et roussis à la graisse avec un soupçon de marinade, rognons frits avec une sauce au sucre et entremêlés de beignets.
M. Caterna redemande deux fois des premiers et trois fois des seconds.
« Je prends mes précautions, nous dit-il. Qui sait ce que l’office du dining-car nous offrira sur les railways de Chine ! Défions-nous des ailerons de requin, qui risquent d’être quelque peu coriaces, et des nids d’hirondelles, qui ne seront sans doute pas d’une entière fraîcheur ! »
Il est dix heures, lorsqu’un coup de gong annonce que les formalités de police vont commencer. Nous quittons la table, après avoir bu un dernier verre de vin de Chao-Hing, et, quelques instants ensuite, nous étions réunis dans la salle des voyageurs.
Tous mes numéros sont présents, — à l’exception bien entendu de Kinko, qui aurait fait honneur à notre déjeuner, s’il lui eût été possible d’y prendre part. Là se trouvent le docteur Tio-King, son Cornaro sous le bras ; Fulk Ephrinell et miss Horatia Bluett, mêlant leurs dents et leurs cheveux — au figuré s’entend ; sir Francis Trevellyan, immobile et muet, intraitable et gourmé, tétant son cigare