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— Non, des têtes de criminels…

— Quelle horreur ! s’écrie la dugazon avec un jeu de physionomie des plus expressifs.

— Que veux-tu, Caroline, répond sentencieusement M. Caterna, si c’est la mode dans ce pays ! »


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XXIV


Depuis Lan-Tchéou, le railway dessert un pays remarquablement cultivé, arrosé de nombreux cours d’eau, et assez accidenté pour nécessiter de fréquents détours. Aussi les ingénieurs ont-ils dû établir plusieurs ouvrages d’art, ponts et viaducs — ouvrages en charpentes d’une solidité douteuse, et le voyageur n’est guère rassuré, quand il sent ces tabliers fléchir sous le poids du train. Il est vrai, nous sommes dans le Céleste-Empire, et les quelques milliers de victimes d’une catastrophe de chemin de fer compteraient à peine au milieu de ses quatre cents millions d’habitants.

« D’ailleurs, nous dit Pan-Chao, le Fils du Ciel ne va jamais en chemin de fer ! »

Allons, tant mieux.

À six heures du soir, nous arrivons à King-Tchéou, après avoir suivi pendant une partie du trajet les contours capricieux de la Grande-Muraille. De cette immense frontière artificielle, élevée entre la Mongolie et la Chine, il ne reste plus que les quartiers de granit et de quartz rougeâtre qui lui servaient de base, sa terrasse en briques avec parapets de hauteurs inégales, quelques vieux canons rongés de rouille et cachés sous l’épais rideau des lichens, puis des tours carrées,