Page:Verne - Claudius Bombarnac.djvu/69

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mière classe, — ce qui me permettra de ne pas les perdre de vue — j’y prends place à mon tour.

Le baron Weissschnitzerdörfer — quel interminable nom ! — n’est pas resté en arrière cette fois. Au contraire, c’est le train qui est de cinq minutes en retard sur l’heure réglementaire.

Et alors l’Allemand de se plaindre, de maugréer, d’exhaler ses objurgations, avec menaces d’attaquer la Compagnie en dommages-intérêts… Dix mille roubles, rien que cela ! si elle lui fait manquer… Manquer quoi, puisqu’il va jusqu’à Pékin ?…

Enfin les derniers coups de sifflet déchirent l’air, les wagons s’ébranlent, et un formidable hurrah salue à son départ le train du Grand-Transasiatique.


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VI


Les idées d’un homme, lorsqu’il est à cheval, diffèrent des idées qui lui viennent lorsqu’il est à pied. La différence est plus notable encore, lorsqu’il voyage en chemin de fer. L’association des pensées, le caractère des réflexions, l’enchaînement des faits, en s’opérant sous son crâne, ont une rapidité égale à celle du train. On « roule » dans sa tête, comme on roule dans son wagon. Aussi je me sens en une disposition d’esprit particulière, désireux d’observer, avide de m’instruire, et cela avec une vitesse de cinquante kilomètres à l’heure. C’est ce taux kilométrique que notre train doit conserver à travers le Turkestan pour tomber à une moyenne de trente, quand il parcourra les provinces du Céleste-Empire.

Ceci, je viens de l’apprendre en consultant l’indicateur-horaire que