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même faire la grasse matinée. On se reverrait à l’heure du déjeuner. L’après-midi serait consacrée aux principaux édifices de la ville dans une visite en commun.

Par suite de cet arrangement, le lendemain, à huit heures, les trois inséparables furent aperçus dans le quartier du commerce. Ses vieux instincts de négociant et d’industriel y avaient attiré l’ancien tonnelier de Perpignan. Ce vil flatteur de Jean Taconnat les excitait, au grand ennui de Marcel Lornans que les moulins à huile et à farine, les fabriques indigènes, n’intéressaient en aucune façon. Ah ! si Mlle Elissane eût été confiée aux soins paternels de M. Dardentor !… Mais elle n’y était pas, et, à cette heure, c’est à peine si ses jolis yeux ouvraient leurs fines paupières.

Pendant la promenade le long des rues de ce quartier, quelques acquisitions furent faites par Clovis Dardentor, — entre autres une paire de ces burnous noirs, connus sous le nom de « zerdanis », dont il comptait se revêtir à l’occasion, tout comme le font les Arabes de l’Afrique du Nord.

Vers midi, reconstitution de la troupe visitante au complet. Elle se rendit aux trois mosquées de la ville, — la première celle d’Aïn-Béïda, qui date de 1761, et dans laquelle Abd el Kader prêchait la guerre sainte, — la seconde transformée en église pour la fabrication du pain de l’âme, — la troisième en magasin à blé pour la fabrication du pain du corps (textuel, d’après Jean Taconnat). Après la place Gambetta, ornée d’une élégante fontaine à vasque de marbre blanc, on visita successivement le beylik, qui est un ancien palais d’architecture arabe, le bureau arabe, de construction mauresque, le jardin public, dessiné au fond du ravin de l’Oued-Toudman, ses riches pépinières, ses plantations d’oliviers et de figuiers dont les fruits servent à faire une sorte de pâte comestible. Au dîner, M. Dardentor se fit servir une grosse miche de cette pâte qu’il déclara excellente, et que Jean Taconnat crut devoir gratifier de la même épithète… au superlatif.

Vers huit heures, l’omnibus reprit ses voyageurs de la veille et