leurs mères, deux sœurs, Parisiennes de naissance. Dès le bas âge, privés chacun de son père, ils avaient été élevés dans d’assez maigres conditions de fortune. Externes au même lycée, leurs classes terminées, ils suivirent, Jean Taconnat, les cours des hautes études commerciales, et Marcel Lornans les cours de l’École de droit. Ils appartenaient à la petite bourgeoisie du Paris commerçant, et modeste était leur ambition. Très unis, comme l’eussent été deux frères dans la maison commune, ils éprouvaient l’un pour l’autre la plus profonde affection, une amitié dont rien ne briserait les liens, bien qu’il y eût entre eux une grande dissemblance de caractère.
Marcel Lornans, réfléchi, attentif, discipliné, avait pris de bonne heure la vie par son côté sérieux.
Au contraire, Jean Taconnat, véritable gamin, jeune poulain échappé, d’une jovialité permanente, aimant peut-être un peu plus le plaisir que le travail, était le boute-en-train, le mouvement, le bruit de la maison. S’il s’attirait parfois des reproches pour ses vivacités intempestives, il savait si gentiment se faire pardonner ! D’ailleurs, tout autant que son cousin, il montrait des qualités qui rachètent bien des défauts.
Tous deux avaient le cœur bon, ouvert, franc, honnête. Enfin l’un et l’autre adoraient leurs mères, et l’on excusera Mmes Lornans et Taconnat de les avoir aimés jusqu’à la faiblesse, puisqu’ils n’en avaient point abusé.
Lorsqu’ils eurent vingt ans, le service militaire les appela en qualité de dispensés, n’ayant qu’un an à passer sous les drapeaux. Ce temps, ils l’accomplirent dans un régiment de chasseurs d’une garnison voisine de Paris. Là encore, une bonne chance voulut qu’ils ne fussent séparés ni dans l’escadron ni dans la chambrée. Cette existence au quartier ne leur fut point autrement désagréable. Ils firent leur métier avec zèle et bonne humeur. C’étaient d’excellents sujets, remarqués de leurs chefs, aimés de leurs camarades, et auxquels le métier militaire n’eût peut-être pas déplu, si, dès l’enfance, leurs idées avaient été dirigées vers ce but. Bref, que, pendant leur