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deux ans de vacances.

Et c’était là son plus gros chagrin.

Pendant ces nuits d’hiver, bien que la sécurité parût assurée à French-den, quelques alertes s’y produisirent. À plusieurs reprises, Phann jetait de longs aboiements d’alarme, lorsque des bandes de carnassiers – presque toujours des chacals – venaient rôder autour de l’enclos. Doniphan et les autres se précipitaient alors par la porte du hall, et, en lançant des tisons embrasés à ces maudites bêtes, ils parvenaient à les mettre en fuite.

Deux ou trois fois aussi, plusieurs couples de jaguars et de couguars se montrèrent aux environs, sans jamais s’approcher autant que les chacals. Ceux-là, on les recevait à coups de fusil, quoique de la distance de laquelle on les tirait, ils ne pussent être mortellement atteints. En somme, ce ne fut pas sans peine que l’on parvint à préserver l’enclos.

Le 24 juillet, Moko eut enfin l’occasion de développer de nouveaux talents culinaires, en accommodant un gibier, dont tous se régalèrent les uns en gourmets, les autres en gourmands.

Wilcox – et Baxter qui l’y aidait volontiers – ne s’étaient pas contentés d’établir des engins pour les animaux, volatiles ou rongeurs, de petite espèce. En courbant quelques-uns de ces baliveaux qui poussaient entre les massifs de Traps-woods, ils avaient pu installer de véritables collets à nœud coulant pour le gibier de grande taille. Ce genre de piège est communément établi en forêt sur les passées de chevreuils, et il n’est pas rare qu’il produise de bons résultats.

À Traps-woods, ce ne fut point un chevreuil, ce fut un magnifique flamant qui, dans la nuit du 24 juillet, vint s’engager à travers l’un de ces nœuds coulants, dont ses efforts ne purent le délivrer. Le lendemain, lorsque Wilcox visita ses pièges, l’animal était déjà étranglé par la boucle que le baliveau, en se relevant, lui avait serré à la gorge. Ce flamant, bien plumé, bien vidé, bien truffé d’herbes aromatiques, rôti à point, fut déclaré excellent. Tant des ailes que des cuisses, il y en eut pour tout le monde, et même chacun eut sa petite part de