Page:Verne - Deux Ans de vacances, Hetzel, 1909.djvu/382

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
364
deux ans de vacances.

Heureusement les pièges et collets, tendus aux abords de French-den, fournissaient du gibier en quantité suffisante. D’ailleurs, les tinamous et les outardes s’étaient tellement multipliés dans la basse-cour, que Service et Garnett furent obligés d’en sacrifier un bon nombre. Comme on avait fait une très abondante récolte des feuilles de l’arbre à thé, ainsi que de cette sève d’érables, qui se transforme si aisément en sucre, il ne fut pas nécessaire de remonter jusqu’au Dike-creek pour renouveler ces provisions. Et même, si l’hiver arrivait avant que les jeunes colons eussent recouvré leur liberté, ils étaient largement pourvus d’huile pour leurs fanaux, de conserves et de gibier pour leur office. Ils n’auraient à refaire que le stock de combustible, en charriant le bois coupé dans les massifs de Bog-woods, et sans trop s’exposer, en suivant la rive du rio Zealand.

À cette époque, une nouvelle découverte vint même ajouter au bien-être de French-den.

Cette découverte ne fut point due à Gordon, bien qu’il fût très entendu aux choses de la botanique. Non ! C’est à Kate qu’en revint tout le mérite.

Il y avait, sur la limite des Bog-woods, un certain nombre d’arbres, qui mesuraient cinquante à soixante pieds de hauteur. Si la hache les avait épargnés jusqu’alors, c’est que leur bois, très filandreux, eût médiocrement alimenté les foyers du hall et de l’enclos. Ils portaient des feuilles de forme oblongue, qui s’alternaient aux nœuds de leurs branches, et dont l’extrémité était armée d’une pointe acérée.

Dès la première fois – le 25 octobre – que Kate aperçut un de ces arbres, elle s’écria :

« Eh !… Voici l’arbre à vache ! »

Dole et Costar, qui l’accompagnaient, partirent d’un franc éclat de rire.

« Comment, l’arbre à vache ? dit l’un.

— Est-ce que les vaches le mangent ? dit l’autre.