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HIER ET DEMAIN.

grin, mon pauvre Rata ! Si je ne puis me rapprocher de toi, je n’en suis pas moins à ton côté, et, quand tu remonteras l’échelle, nous la remonterons ensemble ! »

Bonne Ratane ! Une grosse boulotte, toute simple, toute modeste, aimant bien son mari, et, comme lui, très dévouée à ses maîtres.

Puis, alors, la triste litanie reprit sur un mode lugubre. Quelques centaines d’huîtres infortunées, attendant leur délivrance, elles aussi, se joignirent à ce concert de lamentations. Cela serrait le cœur. Et quel surcroît de douleur pour Raton, le père, et pour dame Ratonne, s’ils avaient su que leur fille n’était plus avec eux !

Soudain, tout se tut. Les écailles se refermèrent.

Gardafour venait d’arriver sur la grève, vêtu de sa longue robe d’enchanteur, coiffé du bonnet traditionnel, la physionomie farouche. Près de lui marchait le prince Kissador, vêtu de riches habits. On imaginerait difficilement à quel point ce seigneur était infatué de sa personne, et comme il se déhanchait d’une manière ridicule pour se donner des grâces.

« Où sommes-nous ? demanda-t-il.

— Au banc de Samobrives, mon prince, répondit obséquieusement Gardafour.

— Et cette famille Raton ?…

— Toujours à la place où je l’ai incrustée pour vous être agréable !