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HIER ET DEMAIN.

la nef, naguère pleine d’harmonies, était retombée au silence. Je dis le silence, car nous étions tous muets, entre les piliers, avec une sensation semblable à celle qu’on éprouve quand, après un vif éclair, on attend le fracas de la foudre.

Cela ne dura pas. Il fallait savoir à quoi s’en tenir. Le bedeau et deux ou trois des plus braves se dirigèrent vers la vis qui monte à la tribune, au fond de la nef. Ils gravirent les marches, mais, arrivés à la galerie, ils ne trouvèrent personne. Le couvercle du clavier était rabattu. Le soufflet, à demi gonflé encore de l’air qui ne pouvait s’échapper faute d’issue, restait immobile, son levier en l’air.

Très probablement, profitant du tumulte et de l’obscurité, l’intrus avait pu descendre la vis, disparaître par la petite porte, et s’enfuir à travers la bourgade.

N’importe ! le bedeau pensa qu’il serait peut-être convenable d’exorciser par prudence. Mais M. le Curé s’y opposa, et il eut raison, car il en aurait été pour ces exorcismes.


V


Le lendemain, le bourg de Kalfermatt comptait un habitant de plus — et même deux. On put les voir se promener sur la place, aller et venir le long de la grande rue,