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Page:Verne - Histoire des grands voyages et des grands voyageurs, Hetzel, 1870, tome 2.djvu/135

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PREMIER VOYAGE AUTOUR DU MONDE

cet endroit, lorsqu’ils aperçurent, un jour, un homme qui leur parut d’une taille gigantesque. À leur vue, il se mit à danser et à chanter en se jetant de la poussière sur la tête. C’était un Patagon, qui se laissa conduire sans résistance sur les vaisseaux. Il manifesta le plus vif étonnement à la vue de tout ce qui l’entourait, mais rien ne le surprit autant qu’un grand miroir d’acier qu’on lui présenta. « Le géant, qui n’avait pas la moindre idée de ce meuble et qui, pour la première fois sans doute, voyait sa figure, recula si effrayé qu’il jeta par terre quatre de nos gens qui étaient derrière lui. » On le ramena à terre, chargé de présents, et l’accueil bienveillant qu’il avait reçu détermina ses compagnons, au nombre de dix-huit, — treize femmes et cinq hommes, — à monter à bord. Grands, le visage large et teint de rouge, sauf les yeux cerclés de jaune, les cheveux blanchis à la chaux, ils étaient drapés dans d’énormes manteaux de fourrure, et portaient ces larges chaussures en peau qui leur firent donner le nom de Grands-Pieds ou Patagons. Leur taille n’était cependant pas aussi gigantesque qu’elle le parut à notre naïf conteur, car elle varie entre 1m,92 et 1m,72, ce qui est toutefois au-dessus de la taille moyenne des Européens. Pour armes, ils avaient un arc court et massif et des flèches de roseau dont la pointe était formée d’un caillou tranchant.

Le capitaine, pour retenir deux de ces sauvages qu’il voulait conduire en Europe, usa d’une supercherie que nous qualifierions d’odieuse aujourd’hui, mais qui n’avait rien de révoltant au XVIe siècle, alors qu’on con-