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LES EXPÉDITIONS POLAIRES

L’air y est pur et salubre, le climat tempéré, la mer est partout sans écueils, et, malgré le manque de ports, elle n’est pas fâcheuse aux navigateurs.

Pendant tout le mois de mars, les Français longèrent la côte, qui leur sembla habitée par des peuples nombreux. Le défaut d’eau les força plusieurs fois à aborder, et ils purent constater que ce qui plaisait le plus aux sauvages, c’étaient des miroirs, des sonnettes, des couteaux, des feuilles de papier. Un jour, ils envoyèrent à terre une chaloupe avec vingt-cinq hommes. Un jeune marinier sauta à l’eau, « pour ce qu’il ne pouvait prendre terre à cause des flots et courants, afin de donner quelques petites denrées à ce peuple, et les leur ayant jetées de loin, pour ce qu’il se méfiait d’eux, il fut poussé violemment par les vagues sur la rive. Les Indiens, le voyant en cet état, le prennent et le portent bien loin de la marine, au grand étonnement du pauvre matelot, lequel s’attendait qu’on l’allât sacrifier. L’ayant mis au pied d’un coteau, à l’object du soleil, ils le dépouillèrent tout nu, s’ébahissant de la blancheur de sa chair, et allumant un grand feu, le firent revenir et reprendre de la force, et ce fut lors, que tant ce pauvre jeune homme que ceux qui étaient au bateau estimaient que ces Indiens le dussent massacrer et immoler, faisant rôtir sa chair en ce grand brasier et puis en prendre leur curée ainsi que font les cannibales. Mais il en advint tout autrement ; car ayant témoigné le désir de revenir à l’embarcation, ils le reconduisirent à l’orée