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LES EXPÉDITIONS POLAIRES

l’affection, la sympathie et la confiance que ce hardi marin avait su inspirer à ses malheureux compagnons. Barentz est une des gloires de la Hollande, si féconde en braves et habiles navigateurs. Nous dirons, tout à l’heure, ce qui a été fait pour honorer sa mémoire.

Après avoir été plusieurs fois obligés de tirer de l’eau les embarcations, sur le point d’être broyées entre les glaçons, après avoir vu à mainte reprise la mer s’ouvrir et se refermer devant eux, après avoir souffert de la soif et de la faim, les Hollandais gagnèrent le cap Nassau. Forcés, un jour, de tirer sur la banquise leur canot qui menaçait d’être défoncé, ils perdirent une partie de leurs provisions et faillirent être tous noyés, car la glace se rompait sous leurs pieds. Au milieu de tant de misères, ils avaient quelquefois de bonnes aubaines. C’est ainsi qu’ayant gagné sur la glace l’île des Croix, ils y trouvèrent soixante-dix œufs de canard de montagne. « Mais ils ne savaient dans quoi les mettre pour les porter. Finalement, l’un d’eux ôta ses braies, les liant par en bas, et, y ayant mis les œufs, ils les ont portés à deux sur une pique, et le troisième portait le mousquet. Ils revinrent ainsi après avoir été douze heures partis, ce qui nous faisait craindre que quelque malheur leur fût arrivé. Les œufs furent les bienvenus, et nous en mangeâmes comme des seigneurs. » À partir du 19 juillet, les Hollandais voguèrent sur une mer, sinon libre de glaces, tout au moins débarrassée de ces grands bancs qui leur avaient donné tant de mal à