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KÉRABAN-LE-TÊTU.

à dire à ce sujet. Le capitaine et son équipage avaient eu pour Nedjeb et pour elle des égards évidemment dus à quelque recommandation puissante. La chambre la plus confortable du petit bâtiment leur avait été réservée. Elles y prenaient leurs repas, elles y reposaient. Elles pouvaient monter sur le pont toutes les fois qu’elles le désiraient ; mais elles se sentaient surveillées de près, pour le cas où, dans un moment de désespoir, elles eussent voulu se soustraire par la mort au sort qui les attendait.

Ahmet écoutait ce récit le cœur serré. Il se demandait si, dans cet enlèvement, le capitaine avait agi pour son propre compte, avec l’intention d’aller revendre ses prisonnières sur les marchés de l’Asie Mineure, — odieux trafic qui n’est pas rare, en effet ! — ou si c’était pour le compte de quelque riche seigneur de l’Anatolie que le crime avait été commis.

À cela, et bien que la question leur eût été directement posée, ni Amasia ni Nedjeb ne purent répondre. Toutes les fois que, dans leur désespoir, implorant ou pleurant, elles avaient interrogé là-dessus Yarhud, celui-ci s’était toujours refusé à s’expliquer. Elles ne savaient donc ni pour qui