Page:Verne - L'Île à hélice, Hetzel, 1895.djvu/188

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
167
trois semaines aux pomotou.


XII

TROIS SEMAINES AUX POMOTOU.

En vérité, le quatuor ferait preuve d’une révoltante ingratitude envers Calistus Munbar s’il ne lui était pas reconnaissant de l’avoir, même un peu traîtreusement, attiré sur Standard-Island. Qu’importe le moyen dont le surintendant s’est servi pour faire des artistes parisiens les hôtes fêtés, adulés et grassement rémunérés de Milliard-City ! Sébastien Zorn ne cesse de bouder, car on ne changera jamais un hérisson aux piquants acérés en une chatte à la moelleuse fourrure. Mais Yvernès, Pinchinat, Frascolin lui-même, n’auraient pu rêver plus délicieuse existence. Une excursion, sans dangers ni fatigues, à travers ces admirables mers du Pacifique ! Un climat qui se conserve toujours sain, presque toujours égal, grâce aux changements de parages ! Et puis, n’ayant point à prendre parti dans la rivalité des deux camps, acceptés comme l’âme chantante de l’île à hélice, reçus chez la famille Tankerdon et les plus distinguées de la section bâbordaise, comme chez la famille Coverley et les plus notables de la section tribordaise, traités avec honneur par le gouverneur et ses adjoints à l’hôtel de ville, par le commodore Simcoë et ses officiers à l’observatoire, par le colonel Stewart et sa milice, prêtant leur concours aux fêtes du Temple comme aux cérémonies de Saint-Mary Church, trouvant des gens sympathiques dans les deux ports, dans les usines, parmi les fonctionnaires et les employés, nous le demandons à toute personne raisonnable, nos compatriotes peuvent-ils regretter le temps où ils couraient les cités de la république fédérale, et quel est l’homme qui serait assez ennemi de lui-même pour ne pas leur porter envie ?