Page:Verne - L'Île à hélice, Hetzel, 1895.djvu/108

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invités… inviti.

Allez donc garder rancune à un pareil homme !

Frascolin prend le papier, et le lit attentivement.

« Quelle garantie aurons-nous ?… demande-t-il.

— La garantie de la Standard-Island Company revêtue de la signature de M. Cyrus Bikerstaff, notre gouverneur.

— Et les appointements seront ceux que je vois indiqués dans l’acte ?…

— Exactement, soit un million de francs…

— Pour quatre ?… s’écrie Pinchinat.

— Pour chacun, répond en souriant Calistus Munbar, et encore ce chiffre n’est-il pas en rapport avec votre mérite que rien ne saurait payer à sa juste valeur ! »

Il serait malaisé d’être plus aimable, on en conviendra. Et, cependant, Sébastien Zorn proteste. Il n’entend accepter à aucun prix. Il veut partir pour San-Diégo, et ce n’est pas sans peine que Frascolin parvient à calmer son indignation.

D’ailleurs, en présence de la proposition du surintendant, une certaine défiance n’est pas interdite. Un engagement d’un an, au prix d’un million de francs pour chacun des artistes, est-ce que cela est sérieux ?… Très sérieux, ainsi que Frascolin peut le constater, lorsqu’il demande :

« Ces appointements sont payables ?…

— Par quart, répond le surintendant, et voici le premier trimestre. »

Des liasses de billets de banque qui bourrent son portefeuille, Calistus Munbar fait quatre paquets de cinquante mille dollars, soit deux cent cinquante mille francs, qu’il remet à Frascolin et à ses camarades.

Voilà une façon de traiter les affaires — à l’américaine.

Sébastien Zorn ne laisse pas d’être ébranlé dans une certaine mesure. Mais, chez lui, comme la mauvaise humeur ne perd jamais ses droits, il ne peut retenir cette réflexion :

« Après tout, au prix où sont les choses dans votre île, si l’on