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l’île à hélice.

— Vous ne trouverez plus à Taio-Haé qu’un résident, quelques gendarmes et soldats indigènes, sous les ordres d’un officier qui remplit aussi les fonctions de juge de paix…

— Pour les procès des naturels ?…

— Des naturels et des colons.

— Il y a donc des colons à Nouka-Hiva ?…

— Oui … deux douzaines.

— Pas même de quoi former une symphonie, ni même une harmonie, et à peine une fanfare ! »

Il est vrai, si l’archipel des Marquises, qui s’étend sur cent quatre-vingt-quinze milles de longueur et sur quarante-huit milles de largeur, couvre une aire de treize mille kilomètres superficiels, sa population ne comprend pas vingt-quatre mille indigènes. Cela fait donc un colon pour mille habitants.

Cette population marquisane est-elle destinée à s’accroître, alors qu’une nouvelle voie de communication aura été percée entre les deux Amériques ? L’avenir le dira. Mais, en ce qui concerne la population de Standard-Island, le nombre de ses habitants s’est augmenté depuis quelques jours par le sauvetage des Malais du ketch, opéré dans la soirée du 5 août.

Ils sont dix, plus leur capitaine, — un homme à figure énergique, comme il a été dit. Âgé d’une quarantaine d’années, ce capitaine se nomme Sarol. Ses matelots sont de solides gaillards, de cette race originaire des îles extrêmes de la Malaisie occidentale. Trois mois avant, ce Sarol les avait conduits à Honolulu avec une cargaison de coprah. Lorsque Standard-Island y vint faire une relâche de dix jours, l’apparition de cette île artificielle ne laissa pas d’exciter leur surprise, ainsi qu’il arrivait dans tous les archipels. S’ils ne la visitèrent point, car cette autorisation ne s’obtenait que très difficilement, on n’a pas oublié que leur ketch prit souvent la mer, afin de l’observer de plus près, la contournant à une demi-encablure de son périmètre. La présence obstinée de ce navire n’avait pu exciter aucun soupçon, et son départ d’Honolulu, quelques heures après le commo-