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l’île à hélice.

au moins, la partie droite de la trajectoire, « le demi-cercle maniable » qui est soustrait à la furie des lames. Mais cette manœuvre est impossible, faute de moteurs. Cette fois, ce n’est plus la sottise humaine ni l’entêtement imbécile de ses chefs qui entraîne Standard-Island, c’est un formidable météore qui va achever de l’anéantir.

Le roi de Malécarlie, le commodore Simcoë, le colonel Stewart, Sébastien Zorn et ses camarades, les astronomes et les officiers abandonnent l’observatoire, où ils ne sont plus en sûreté. Il était temps ! À peine ont-ils tait deux cents pas que la haute tour s’écroule avec un fracas horrible, troue le sol du square, et disparaît dans l’abîme.

Un instant après, l’édifice entier n’est plus qu’un amas de débris.

Cependant, le quatuor a la pensée de remonter la Unième Avenue et de courir au casino, où se trouvent ses instruments qu’il veut sauver, s’il est possible. Le casino est encore debout, ils parviennent à l’atteindre, ils montent à leurs chambres, ils emportent les deux violons, l’alto et le violoncelle dans le parc où ils vont chercher refuge.

Là sont réunies plusieurs milliers de personnes des deux sections. Les familles Tankerdon et Coverley s’y trouvent, et peut-être est-il heureux pour elles qu’au milieu de ces ténèbres, on ne puisse se voir, on ne puisse se reconnaître.

Walter a été assez heureux cependant pour rejoindre miss Dy Coverley. Il essaiera de la sauver au moment de la suprême catastrophe… Il tentera de s’accrocher avec elle à quelque épave…

La jeune fille a deviné que le jeune homme est près d’elle, et ce cri lui échappe :

« Ah ! Walter !…

— Dy… chère Dy… je suis là !… Je ne vous quitterai plus… »

Quant à nos Parisiens, ils n’ont pas voulu se séparer… Ils se tiennent les uns près des autres. Frascolin n’a rien perdu de son sang-froid. Yvernès est très nerveux. Pinchinat a la résignation ironique. Sébastien Zorn, lui, répète à Athanase Dorémus, lequel s’est enfin décidé à rejoindre ses compatriotes :

« J’avais bien prédit que cela finirait mal !… Je l’avais bien prédit !