abandonné Madeleine-bay en remontant vers le trente-cinquième parallèle, afin de reprendre son itinéraire à la hauteur des îles Sandwich. Or, il se trouvait le long de la côte de la Basse-Californie, lorsque Calistus Munbar, ayant appris par les communications téléphoniques que le Quatuor Concertant, après avoir quitté San-Francisco, se dirigeait vers San-Diégo, proposa de s’assurer le concours de ces éminents artistes. On sait de quelle façon il procéda à leur égard, comment il les embarqua sur l’île à hélice, laquelle stationnait alors à quelques encablures du littoral, et comment, grâce à ce tour pendable, la musique de chambre allait charmer les dilettanti de Milliard-City.
Telle est cette neuvième merveille du monde, ce chef-d’œuvre du génie humain, digne du vingtième siècle, dont deux violons, un alto et un violoncelle sont actuellement les hôtes, et que Standard-Island emporte vers les parages occidentaux de l’Océan Pacifique.
VI
INVITÉS… INVITI.
À supposer que Sébastien Zorn, Frascolin, Yvernès, Pinchinat eussent été gens à ne s’étonner de rien, il leur eût été difficile de ne point s’abandonner à un légitime accès de colère en sautant à la gorge de Calistus Munbar. Avoir toutes les raisons de penser que l’on foule du pied le sol de l’Amérique septentrionale et être transporté en plein Océan ! Se croire à quelque vingt milles de San-Diégo, où l’on est attendu le lendemain pour un concert, et apprendre brutalement qu’on s’en éloigne à bord d’une île artificielle, flottante et mouvante ! Au vrai, cet accès eût été bien excusable.