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L’AGENCE THOMPSON AND Co.

était plutôt jovial aujourd’hui. Mais sa gaieté est encore plus pénible que sa froideur, et je ne serais pas étonné que sa compagnie ait suffi à rembrunir Mrs. Lindsay.

Roger regarda Robert qui ne broncha pas. Il poursuivit :

— D’autant que la pauvre femme s’est vue réduite à ses seules forces pour soutenir cet interminable assaut. Miss Dolly et moi, nous l’avons lâchement abandonnée, oublieux du reste du monde, jusques et y compris le beau-frère.

Cette fois, Robert ramena son regard vers son compatriote.

Celui-ci, d’ailleurs, ne se fit pas prier pour achever sa confidence.

— Comment trouvez-vous miss Dolly ? demanda-t-il à son ami en rapprochant son fauteuil d’une saccade.

— Adorable, répondit Robert avec sincérité.

— N’est-ce pas ! fit Roger. Eh bien ! mon cher, je veux que vous en soyez le premier informé. Cette fille adorable, c’est vous qui l’avez dit, je l’aime, et je compte bien l’épouser dès le retour.

Robert ne parut pas autrement surpris de cette nouvelle.

— Je m’attendais un peu à votre confidence, avoua-t-il en souriant. À vrai dire, votre secret est à bord un peu celui de Polichinelle. Toutefois, me permettrez-vous une question ? C’est à peine si vous connaissez ces dames Lindsay. Avez-vous pensé qu’une union avec leur famille pourrait rencontrer des difficultés dans la vôtre ?

— La mienne ? répondit Roger en serrant la main du bénévole conseiller. Je n’en ai pas. Tout au plus quelques cousins éloignés que mes affaires ne concernent en rien. Et puis, aimer en hussard ne veut pas dire aimer en fou. Dans cette circonstance, j’ai agi, sachez-le, avec la prudence d’un vieux notaire. Dès notre arrivée aux Açores, — la tarentule du mariage m’avait déjà piqué à cette époque, — j’ai demandé par télégraphe sur la famille Lindsay des renseignements qui me sont parvenus à Madère. Ces renseignements, sauf peut-être en ce qui concerne le nommé Jack, — mais à cet égard le télégraphe ne m’a rien appris que je