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L’AGENCE THOMPSON AND Co.

« Eh ! que diable faites-vous là ? Qu’est devenu votre régiment ? demandait Roger de la voiture où il était assis en face de deux Américaines.

— Mon régiment ? répondit Robert sur le même ton, je serais curieux d’en avoir des nouvelles. Le colonel vient de rentrer à bord dans l’espoir d’y retrouver ses soldats.

— Il n’y trouvera que l’impayable Johnson, dit Roger en riant, puisque cet original s’obstine à fuir le contact de la terre. Mais vous, que faites-vous ?

— Absolument rien, comme vous le voyez.

— Eh bien, alors, conclut Roger en faisant une place à côté de lui, venez avec nous. Vous nous piloterez, monsieur le Professeur. »

Le rio de Guiniguanda sépare Las Palmas en deux parties inégales : la ville haute, habitée seulement par la noblesse et les fonctionnaires, et la ville basse, plus spécialement commerçante, qui va mourir sur le promontoire de l’Ouest, à l’extrémité duquel s’élève la forteresse du Castillo del Rey.

Pendant trois heures, les quatre touristes parcoururent, soit à pied, soit en voiture, les rues de la capitale ; puis, la lassitude les prenant, ils se firent ramener au Seamew. À qui les eût alors interrogés, voilà ce qu’ils eussent pu répondre :

« Las Palmas est une ville bien bâtie, aux rues étroites et ombreuses, mais où la nature du terrain transforme la promenade en une perpétuelle montée suivie d’une perpétuelle descente. En dehors de la cathédrale de style renaissance espagnol, elle possède peu de monuments intéressants. Quant à l’aspect mauresque de la ville vue de la mer, il vous incite à des espoirs trompeurs. De près, le charme s’évanouit. Rien de moins mauresque que les rues, les maisons, les habitants, ces derniers offrant à l’admiration publique des élégances exclusivement européennes, voire françaises. »

À cela se bornaient leurs impressions de voyage. Et comment en eût-il été autrement ? Avaient-ils vécu de la vie de ce peuple,