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L’AGENCE THOMPSON AND Co.

promise par le programme, constituait le clou du voyage. Voilà certes qui était nouveau et original ! Rien que l’approche d’une telle excursion faisait déjà notablement remonter les actions de Thompson.

Mais vraiment, les touristes du Seamew jouaient de malheur. Ce pic vers lequel, pendant la traversée de Canarie à Ténériffe, ils avaient tendu leurs regards, il s’était obstinément caché derrière un épais rideau de nuages infranchissables pour les meilleures lorgnettes. Maintenant, en admettant que le ciel se fût déblayé, il était trop tard. La côte elle-même bornait la vue.

On supportait toutefois ce contre-temps avec philosophie. Il semblait même que le pic eût encore excité la curiosité de ses futurs conquérants en demeurant si mystérieux. On ne parlait que de lui, et l’obsession était telle que Thompson put assez aisément persuader à la plupart de ses passagers de renoncer à fouler le pavé de Santa-Cruz.

Le jeune ménage ne fut pas de ceux-là. Avant même que l’ancre eût mordu le fond, il s’était fait mettre à terre avec sa discrétion accoutumée, et en peu d’instants il eut disparu pour ne reparaître qu’à l’heure du départ.

Leurs compagnons les auraient probablement suivis, si Thompson, constatant l’indifférence générale pour la capitale de Ténériffe, ne s’était risqué à proposer d’aller par eau à la ville d’Orotava, qui, située sur la côte septentrionale, est le point de départ des ascensions, au lieu de se rendre par terre, conformément au programme. De cette manière, songeait-il, il économiserait un transport onéreux.

À sa grande surprise, cette proposition ne rencontra aucune difficulté et, le départ du Seamew ayant été fixé au lendemain, le plus grand nombre des touristes décidèrent qu’ils resteraient à bord.

Quelques voyageurs pratiques cependant n’imitèrent pas cette indifférence exagérée. Ceux là — toujours les mêmes : Alice Lindsay et sa sœur, Roger de Sorgues, leur inséparable compagnon,