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L’AGENCE THOMPSON AND Co.

heures de l’après-midi, quand on aperçut ses rivages sablonneux. À cinq heures, on parvenait à sa hauteur.

C’était la réédition de l’Île du Sel et de Boavista. Rien qu’une steppe de sable, sans rivière, sans sources et sans arbres, sur lequel des plaques de sel réverbéraient par endroits les rayons du soleil. On avait peine à croire que plus de trois mille créatures humaines vécussent sur cette lande si totalement inféconde.

L’œil lassé de cette monotonie de tristesse se reportait avec plaisir vers l’horizon du Sud où grandissait rapidement São-Thiago. Ses rocs découpés, ses falaises de basalte, ses barranques emplies d’une végétation touffue, rappelaient un peu l’aspect des Açores, et, par rapport à la désolation des sables, on trouvait agréable cette sauvagerie autrefois jugée fastidieuse.

À huit heures du soir, on doubla la Pointe Est, au moment où s’allumait le phare qui la couronne. Une heure plus tard, dans la nuit grandissante, on distingua le feu de la pointe de Tamaro qui ferme à l’occident le Porto da Praya. Une heure encore, et, après avoir doublé la pointe des Biscadas, les barques pénétraient à la file indienne dans l’eau plus calme de la baie, au fond de laquelle brillaient les lumières de la ville.

Ce n’est pas vers ces lumières que se dirigèrent les marins caboverdiens. À peine avaient-ils doublé la pointe des Biscadas, qu’ils avaient lofé en grand, s’efforçant de longer la côte. Quelques instants plus tard, ils mouillaient à une assez grande distance de la ville.

Robert s’étonna de cette manœuvre. Renseigné par son guide, il n’ignorait pas qu’un débarcadère existe sur le rivage occidental. Mais tout ce qu’il put dire fut inutile. Pour une raison ou une autre, les mulâtres persistèrent dans leur projet, et commencèrent le transbordement des gens et des choses au moyen de chaloupes amenées par les deux bateaux portant les bagages.

Successivement, les passagers furent conduits à un petit rocher situé au pied de la falaise qui termine la pointe orientale