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Page:Verne - L'Agence Thompson and C°, Hetzel, 1907.djvu/502

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L’AGENCE THOMPSON AND Co

par les Africains féroces et par le désert, plus féroce encore, un prisonnier s’échappe-t-il jamais ?

Toutefois, une dernière difficulté se dressait devant Jack. S’il voulait partir sans encombre, il fallait nécessairement que son départ eût lieu avec l’assentiment général. Le cheik, en effet, allait informer les naufragés du chiffre auquel il avait fixé chaque rançon et leur apprendre le nom de l’émissaire choisi. Jack devait donc jouer jusqu’au bout la comédie du dévouement, faire des promesses de circonstance, accepter les lettres de tous, quitte à jeter à l’eau à la première occasion cette correspondance inutile. À cela, pas de difficulté, car Jack estimait avec juste raison que ses compagnons n’avaient aucun motif de le suspecter plutôt qu’un autre.

Malheureusement, il jugeait tout cela moins simple, en pensant à sa belle-sœur. De celle-là aussi le consentement était nécessaire. Il constituait même le consentement principal. Jack réussirait-il à l’obtenir ?

Pourquoi pas ? se disait-il. Et cependant, en se rappelant, de quelle façon Alice avait refusé le nom qu’il lui offrait, en songeant à la scène du Curral das Freias, une inquiétude le troublait.

Entre sa belle-sœur et lui, une explication était en tous cas nécessaire. Pourtant, son hésitation était telle, que, durant toute cette journée de repos, il en recula l’instant d’heure en heure. La nuit tombait, quand, se décidant tout à coup à en finir, il franchissait enfin le seuil de la tente où Alice avait trouvé refuge.

Alice était seule. Assise sur le sol, le menton dans la main, elle songeait, à peine éclairée par une rudimentaire lampe à l’huile, dont la lueur fumeuse mourait avant d’avoir atteint les parois de la tente.

En entendant Jack, elle se redressa brusquement, puis attendit qu’il voulût bien donner l’explication de sa visite. Mais celui-ci était embarrassé. Il ne savait comment entrer en matière. Un