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Page:Verne - L’École des Robinsons - Le Rayon vert.djvu/160

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l’école des robinsons

Pendant ce temps, le prisonnier avait rejoint son sauveur. Un instant, il s’était arrêté, avec la crainte que lui inspiraient ces êtres supérieurs ; mais, presque aussitôt, il avait repris sa course. Dès qu’il fut arrivé devant les deux blancs, il se courba jusqu’au sol ; puis, prenant le pied de Godfrey, il le plaça sur sa tête en signe de servitude.

C’était à croire que ce naturel de la Polynésie, lui aussi, avait lu Robinson Crusoé !


XVIII

qui traite de l’éducation morale et physique d’un simple indigène du pacifique.


Godfrey releva aussitôt le pauvre diable, qui restait prosterné devant lui. Il le regarda bien en face.

C’était un homme âgé de trente-cinq ans au plus, uniquement vêtu d’un lambeau d’étoffe qui lui ceignait les reins. À ses traits, comme à la conformation de sa tête, on pouvait reconnaître en lui le type du noir africain. Le confondre avec les misérables abâtardis des îles polynésiennes, qui, par la dépression du crâne, la longueur des bras, se rapprochent si étrangement du singe, cela n’eût pas été possible.

Maintenant, comment il se faisait qu’un nègre du Soudan ou de l’Abyssinie fût tombé entre les mains des naturels d’un archipel du Pacifique, on n’aurait pu le savoir que si ce noir eût parlé l’anglais ou l’une des deux ou trois langues européennes que Godfrey pouvait entendre. Mais il fut bientôt constant que ce malheureux n’employait qu’un idiome absolument incompréhensible, — probablement le langage de ces indigènes, chez lesquels, sans doute, il était arrivé fort jeune.

En effet, Godfrey l’avait immédiatement interrogé en anglais : il n’en avait obtenu aucune réponse. Il lui fit alors comprendre par signes, non sans peine, qu’il voulait savoir son nom.