Page:Verne - L’Étoile du sud, Hetzel, 1884.djvu/190

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
186
L’ÉTOILE DU SUD.

de feuilles que son compagnon lui avait accommodé au pied du baobab.

Le brave garçon ne s’en tint pas là. Il voulut aller chercher dans la vallée voisine la tente-abri qu’il emportait toujours en expédition, et, un quart d’heure après, il l’avait plantée au-dessus de son cher malade.

« Et maintenant, dit-il, voyons ton histoire, ami Cyprien, si toutefois cela ne doit pas te fatiguer trop de me la raconter ! »

Cyprien se sentait assez fort pour satisfaire la curiosité bien naturelle de Pharamond Barthès. Assez sommairement, d’ailleurs, il lui raconta les événements qui s’étaient passés en Griqualand, pourquoi il avait quitté ce pays à la poursuite de Matakit et de son diamant, quels avaient été les principaux faits de son expédition, la triple mort d’Annibal Pantalacci, de Friedel et de James Hilton, la disparition de Bardik, et enfin comment il attendait son serviteur Lî, qui devait venir le rejoindre au campement.

Pharamond Barthès écoutait avec une extrême attention. Interrogé sur ce point, s’il avait rencontré un jeune Cafre, dont Cyprien lui donnait le signalement et qui était celui de Bardik, il répondit négativement.

« Mais, ajouta-t-il, j’ai trouvé un certain cheval abandonné, qui pourrait bien être le tien ! »

Et tout d’une haleine, il raconta à Cyprien dans quelles circonstances ce cheval était tombé entre ses mains.

« Il y a tout justement deux jours, dit-il, je chassais avec trois de mes Bassoutos dans les montagnes du sud, lorsque je vois tout à coup déboucher d’un chemin creux un excellent cheval gris, tout nu, sauf un licou et une longe qu’il traînait après lui. Cet animal paraissait évidemment très indécis sur ce qu’il avait à faire ; mais je l’ai appelé, je lui ai montré une poignée de sucre, et il est venu à moi ! Voilà donc ledit cheval prisonnier, — une excellente bête, pleine de courage et de feu, « salée » comme un jambon…

— C’est le mien !… C’est Templar ! s’écria Cyprien.

— Eh bien mon ami, Templar est à toi, répondit Pharamond Barthès, et je me ferai un véritable plaisir de te le rendre ! Allons, bonsoir, rendors-toi maintenant ! Demain, dès l’aube, nous quitterons ce lieu de délices ! »

Puis, joignant l’exemple au principe, Pharamond Barthès se roula dans sa couverture et s’endormit auprès de Cyprien.

Le lendemain, le Chinois rentrait précisément au campement avec quelques provisions. Aussi, avant que Cyprien ne se fût réveillé, Pharamond Barthès, après l’avoir mis au courant de tout, le chargea-t-il de veiller sur son maître,