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le tell.

repoussée à travers les marnes souterraines jusqu’à la surface du chott, et même n’était-il pas possible que, sous l’action de cet extraordinaire phénomène, cette surface se fût abaissée, et bien au-dessous du niveau méditerranéen ?…

Telle était la question que se posait M. de Schaller et, lorsque le soleil aurait reparu sur l’horizon, était-il probable qu’il pût la résoudre ?…

Jusqu’aux primes lueurs de l’aube, les lointaines rumeurs qui paraissaient venir de l’est ne cessèrent de troubler l’espace. Il se produisit aussi, à intervalles réguliers, des secousses assez fortes pour que le tell en frémît sur sa base, le long de laquelle l’eau se précipitait avec ce bruit de ressac d’une marée montante contre les roches d’un littoral.

À un certain moment, tandis que tous essayaient de se rendre compte par l’oreille de ce que leurs yeux ne pouvaient voir, le capitaine Hardigan fut amené à dire :

« Est-il donc possible que le Melrir se soit rempli avec les eaux souterraines remontées à sa surface ?…

— Ce serait bien invraisemblable, répondit M. de Schaller. Mais je crois qu’il est une explication plus admissible…

— Et laquelle ?…

— C’est que ce soient les eaux du golfe qui l’ont inondé… en envahissant depuis Gabès toute cette portion du Djerid…

— Alors, s’écria le brigadier, nous n’aurions plus qu’une ressource… ce serait de nous sauver à la nage ! »

Le jour allait enfin paraître. Mais les quelques clartés qui se dessinaient à l’orient du chott étaient bien pâles, et il semblait qu’un épais rideau de brumes se tendit à l’horizon.

Tous, debout au pied des arbres, le regard fixé dans cette direction, n’attendaient que les premières lueurs de l’aube pour reconnaître la situation. Mais, par une malchance déplorable, ils furent déçus dans leur attente !