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l’invasion de la mer

cavaliers et de chevaux disparut, et, aux dernières lueurs du crépuscule on ne voyait plus que des cadavres entraînés par l’énorme vague vers l’ouest du Melrir.

Ce jour-là, lorsque le soleil acheva sa course diurne, c’était sur un horizon de mer qu’il s’était couché !…

Quelle nuit pour les fugitifs ! Si une rencontre avec les fauves d’abord, avec les Touareg ensuite leur avait été évitée, n’avaient-ils pas à craindre que l’inondation ne gagnât le sommet de leur refuge.

Mais il était impossible de le quitter et ce fut avec épouvante qu’ils entendirent l’eau monter peu à peu au milieu de cette profonde obscurité, tout emplie d’un bruit de ressac…

On se figure ce que fut cette nuit, tandis que le roulement des eaux, activé par une forte brise de l’est, ne cessait de se faire entendre. Et l’air s’emplissait des cris de ces innombrables oiseaux de mer qui volaient maintenant à la surface du Melrir !…

Le jour reparut. La crue n’avait pas dépassé l’arête du refuge, et il semblait bien qu’elle eût atteint son maximum, en remplissant le chott à pleins bords.

Rien à la surface de cette immense plaine liquide ! La situation des fugitifs paraissait désespérée. De nourriture, ils n’en avaient plus pour finir la journée, et aucun moyen de s’en procurer sur cet aride îlot. Fuir… Par quel moyen ?… Construire un radeau avec ces arbres et s’y embarquer ? Mais comment les abattre ?… Et puis, ce radeau, le pourrait-on diriger, et, avec le vent épouvantable qui régnait, ne serait-il pas repoussé au large des rives du Melrir par des courants contre lesquels on ne pourrait lutter ?…

« Il sera difficile de s’en tirer, dit le capitaine Hardigan, après avoir porté ses regards sur le chott…

— Eh, mon capitaine, répondit le brigadier Pistache, mais si quelque secours nous arrivait ?… On ne sait pas… »

La journée s’écoulait sans que la situation eût changé. Le