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l’invasion de la mer

Pendant la nuit du 26 au 27, les eaux du golfe s’étaient répandues à la surface de cette partie orientale du Djerid !… Dès lors, une communication existait entre la Petite-Syrte et le Melrir, et même praticable puisqu’un navire avait pu suivre, sur la ligne du canal sans doute, cette route maritime à travers la région des sebkhas et des chotts.

Vingt-cinq minutes après que ce bâtiment eut été signalé, on voyait sa cheminée se dessiner sur l’horizon, puis sa coque se montra, la coque du premier navire qui sillonnait les eaux du nouveau lac.

« Des signaux !… faisons des signaux ! » s’écria l’un des spahis.

Et comment le capitaine Hardigan aurait-il pu indiquer la présence des fugitifs sur l’étroit sommet de cet îlot ?… La butte était-elle même assez élevée pour que l’équipage eût pu l’apercevoir ?… Et ce navire entrevu ne se trouvait-il pas encore à plus de deux grandes lieues dans le nord-est ?…

D’ailleurs, la nuit venait de succéder au court crépuscule, et la fumée ne fut bientôt plus visible au milieu de l’obscurité.

Et alors le spahi, qui ne fut plus maître de lui, de s’écrier dans un mouvement de désespoir :

« Nous sommes perdus !…

— Sauvés… sauvés, au contraire, répondit le capitaine Hardigan… Nos signaux, qu’on n’aurait pu apercevoir pendant qu’il faisait jour, on les apercevra la nuit !…

Et il ajouta :

« Le feu aux arbres… le feu !…

— Oui, mon capitaine ! hurla positivement le brigadier Pistache, le feu aux arbres !… et ils flamberont comme des allumettes ! »

À l’instant, le briquet fut battu ; des branches, tombées çà et là, s’empilèrent au pied des troncs arbres ; une flamme se dégagea, qui gagna les branches supérieures et de vives clameurs dissipèrent les ténèbres autour de l’îlot.