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l’invasion de la mer

qu’il faut porter la première reconnaissance scientifique de cette région, que bornent au nord les montagnes d’Aurès, à trente kilomètres dans le sud de Biskra. Ce fut, en effet, en 1874 que l’audacieux officier étudia ce projet de mer intérieure, auquel il devait consacrer tant d’efforts. Mais pouvait-il prévoir que nombre d’obstacles surgiraient, dont son énergie ne parviendrait peut-être pas à triompher ? Quoi qu’il en soit, notre devoir est de rendre à cet homme de courage et de science l’hommage qui lui est dû. »

Après les premières études faites par le promoteur de cette entreprise, le ministre de l’Instruction publique chargea officiellement le capitaine Roudaire de diverses missions scientifiques qui se rapportaient à la reconnaissance de la région. De très exactes observations géodésiques furent effectuées, qui eurent pour résultat de fixer le relief de cette partie du Djerid.

C’est alors que la légende dut s’effacer devant la réalité : cette région, que l’on disait avoir été une mer autrefois en communication avec la Petite-Syrte, ne s’était jamais trouvée dans ces conditions. En outre, cette dépression du sol, que l’on disait entièrement inondable depuis le seuil de Gabès jusqu’aux extrêmes chotts algériens, ne l’était que dans une portion relativement restreinte. Mais, de ce que la mer Saharienne n’aurait pas les dimensions que la croyance populaire lui avait attribuées tout d’abord, il ne ressortait pas que le projet dût être abandonné.

« Dans le principe, Messieurs, dit M. de Schaller, on avait paru croire que cette mer nouvelle pourrait s’étendre sur quinze mille kilomètres carrés. Or, de ce chiffre il a fallu en retrancher cinq mille pour les sebkha tunisiennes, dont le niveau est supérieur à celui de la Méditerranée. En réalité, d’après les évaluations du capitaine Roudaire, c’est à huit mille kilomètres carrés que doit être réduite cette superficie inondable des chotts Rharsa et Melrir, dont l’altitude négative sera à vingt-sept mètres plus bas que la surface du golfe de Gabès. »