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Page:Verne - L’Invasion de la mer - Le Phare du bout du monde, Hetzel, 1905.djvu/312

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LE PHARE DU BOUT DU MONDE.

d’une quinzaine de milles. Au total, le caractère sauvage, désolé, s’accentuait plus de ce côté qu’au littoral opposé où s’ouvrait la baie d’Elgor.

Bien que l’ouest de l’Île des États fût en partie protégé contre les vents de nord-ouest par les hauteurs de la Terre-de-Feu et de l’archipel Magellanique, la mer s’y déchaînait avec autant de fureur qu’aux abords du cap San Juan, de la pointe Diegos et de la pointe Several. Si donc un phare avait été établi du côté de l’Atlantique, un autre n’eût pas été moins nécessaire du côté du Pacifique, pour les bâtiments cherchant le détroit de Lemaire, après avoir doublé le cap Horn. Peut-être le gouvernement chilien se réservait-il, à cette époque, de suivre un jour l’exemple de la République Argentine.

Dans tous les cas, si ces travaux eussent été entrepris en même temps sur les deux extrémités de l’Île des États, cela eût singulièrement compromis la situation d’une bande de pillards qui s’étaient réfugiés dans le voisinage du cap Saint-Barthélemy.

Plusieurs années auparavant ces malfaiteurs avaient pris pied à l’entrée de la baie d’Elgor. Ils y avaient découvert une profonde caverne creusée dans la falaise. Cette caverne leur offrait un sûr abri, et, aucun navire ne relâchant jamais à l’Île des États, ils s’y trouvaient en parfaite sécurité.

Ces hommes, au nombre d’une douzaine, avaient pour chef un individu du nom de Kongre, auquel un certain Carcante servait de second.

Ce n’était qu’un ramassis de gens originaires du Sud-Amérique. Cinq d’entre eux étaient de nationalité argentine ou chilienne. Quant aux autres, vraisemblablement des natifs de la Fuégie, recrutés par Kongre, ils n’avaient eu qu’à traverser le détroit de Lemaire pour compléter la bande, sur cette île qu’ils connaissaient déjà pour y être venus pêcher pendant la belle saison.

De Carcante, tout ce qu’on en savait, c’est qu’il était Chilien,