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Page:Verne - L’Invasion de la mer - Le Phare du bout du monde, Hetzel, 1905.djvu/399

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APRÈS LE NAUFRAGE.

croyait certain de sa situation en latitude, le point ayant été fait dans la journée. Cette route, avec raison, lui paraissait préférable pour doubler le cap Horn et remonter ensuite vers la côte australienne.

À la nuit la bourrasque redoubla de violence. Toute la voilure avait été serrée sauf la misaine et le petit hunier au bas ris, et le trois-mâts courait vent arrière.

À ce moment, le capitaine pensait être encore à plus de vingt milles au large de la terre. Il ne voyait aucun danger à porter dessus, jusqu’au moment où il relèverait le feu du phare. En le laissant alors largement dans le sud, il ne courait pas risque de se jeter sur les récifs du cap San Juan, et donnerait sans peine dans le détroit.

Le Century continua donc à faire vent arrière, Harry Steward ne doutant pas de voir le phare avant une heure, puisque son feu avait un rayon de dix milles.

Or, ce feu, il ne l’aperçut pas. Alors qu’il se croyait encore à bonne distance de l’île, un épouvantable choc se produisit. Trois matelots, occupés dans la mâture, disparurent avec le mât de misaine et le grand mât. En même temps, les lames assaillirent la coque, qui s’ouvrit, et le capitaine, le second, les survivants de l’équipage furent jetés par-dessus le bord au milieu d’un ressac qui ne laisserait de salut à personne.

Ainsi le Century avait péri corps et biens. Seul, le second, John Davis, grâce à Vasquez, venait d’échapper à la mort.

Et, maintenant, sur quelle côte le trois-mâts était-il venu se perdre, c’est ce que Davis ne pouvait comprendre.

Il demanda de nouveau à Vasquez :

« Où sommes-nous ?

— À l’Île des États.

— L’Île des États ! s’écria John Davis, stupéfait de cette réponse.

— Oui… l’Île des États, reprit Vasquez, à l’entrée de la baie d’Elgor !