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LE PHARE DU BOUT DU MONDE.

On ne percevait que le bruit des talons martelant le sol.

Toute la matinée, Vasquez et Davis entendirent ainsi piétiner autour d’eux. Des bandes passaient, lancées à la poursuite de l’insaisissable assaillant. Cependant, à mesure que les heures s’écoulèrent, cette poursuite parut se ralentir. Depuis longtemps déjà, rien n’avait plus troublé le silence environnant, quand, vers midi, trois ou quatre hommes s’arrêtèrent à deux pas du trou dans lequel Davis et Vasquez étaient blottis.

« Décidément, il est introuvable ! dit l’un d’eux, en s’asseyant sur le roc même qui en obstruait l’orifice.

— Mieux vaut y renoncer, affirma un autre. Les camarades sont déjà rentrés à bord.

— Et nous allons faire comme eux. D’autant plus que, après tout, le gredin a manqué son coup. »

Invisibles, Vasquez et Davis tressaillirent, et prêtèrent l’oreille avec plus d’attention encore.

« Oui, approuva un quatrième interlocuteur. Voyez-vous ça, qu’il voulait faire sauter le gouvernail !

— L’âme et le cœur d’un bâtiment, quoi !

— Une belle jambe, comme dit l’autre, que ça nous aurait fait !

— Heureux que sa cartouche ait fusé à bâbord et à tribord. Le mal se réduit à un trou dans la voûte et à une ferrure arrachée. Quant à la mèche du gouvernail, c’est à peine si le bois a été roussi.

— Tout sera réparé aujourd’hui, reprit le premier qui avait parlé. Et ce soir, avant le flot, vire au guindeau, les garçons ! Après ça, que l’autre crève de faim, si ça lui chante !

— Eh bien, Lopez ! es-tu assez reposé ? interrompit brutalement une voix rude. À quoi bon tant bavarder ? Rentrons.

— Rentrons ! » dirent les trois autres, en se remettant en marche.

Dans la cachette où ils étaient terrés, Vasquez et Davis, écrasés par ce qu’ils venaient d’entendre, se regardaient en silence.