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Page:Verne - La Maison à vapeur, Hetzel, 1902.djvu/127

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allahabad.

dans les défilés des monts Sautpourra, où il s’était réfugié avec sa troupe, a été tué dans la lutte. Il n’y a aucun doute possible sur son identité. Il a été reconnu par des habitants de Cawnpore et de Lucknow. Un doigt lui manquait à la main gauche, et l’on sait que Nana Sahib avait fait l’amputation de l’un de ses doigts, au moment où, par de fausses obsèques, il voulut faire croire à sa mort. Le royaume de l’Inde n’a donc plus rien à craindre des manœuvres du cruel nabab qui lui a coûté tant de sang. »

Le colonel Munro avait lu ces lignes d’une voix sourde ; puis, il laissa tomber le journal.

Nous nous taisions. La mort de Nana Sahib, indiscutable cette fois, nous délivrait de toute crainte dans l’avenir.

Le colonel Munro, après quelques minutes de silence, passa sa main sur ses yeux comme pour effacer d’affreux souvenirs. Puis :

« Quand devons-nous quitter Allahabad ? demanda-t-il.

– Demain, au point du jour, répondit l’ingénieur.

– Banks, reprit le colonel Munro, ne pouvons-nous nous arrêter quelques heures à Cawnpore ?

– Tu veux ?…

– Oui, Banks, je voudrais… je veux revoir encore une fois… une dernière fois Cawnpore !

– Nous y serons dans deux jours ! répondit simplement l’ingénieur.

– Et après ?… reprit le colonel Munro.

– Après ?… répondit Banks, nous continuerons notre expédition vers le nord de l’Inde !

– Oui !… au nord ! au nord !… » dit le colonel d’une voix qui me remua jusqu’au fond du cœur.

En vérité, il était à croire que sir Edward Munro conservait encore quelque doute sur l’issue de cette dernière lutte entre Nana Sahib et les agents de l’autorité anglaise. Avait-il raison contre ce qui semblait être l’évidence même ?

L’avenir nous l’apprendra.