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la maison à vapeur.

— Votre observation est juste, mon cher Hod, répondis-je, et je ne sais à quelle cause attribuer l’absence de ces rôdeurs de nuit. Mais prenons garde à nous-mêmes, ou bien, au milieu de ce calme, nous finirions par nous endormir !

— Résistons, résistons ! répondit le capitaine Hod, en se détirant les bras. L’heure approche, à laquelle il faudra partir. »

Et nous nous reprîmes à causer par phrases qui traînaient, entrecoupées de longs silences.

Combien de temps dura cette rêverie, je n’aurais pu le dire ; mais soudain une sourde agitation se produisit, qui me tira subitement de cet état de somnolence.

Le capitaine Hod, également secoué de sa torpeur, s’était levé en même temps que moi. Il n’y avait pas à en douter, cette agitation venait de se produire dans la cage des fauves.

Lions, tigres, panthères, léopards, tout à l’heure si paisibles, faisaient entendre maintenant un sourd murmure de colère. Debout dans leurs compartiments, allant et venant à petits pas, ils aspiraient fortement quelque émanation du dehors, et se dressaient en renâclant contre les barreaux de fer de leurs compartiments.

« Qu’ont-ils donc ? demandai-je.

— Je ne sais, répondit le capitaine Hod, mais je crains qu’ils n’aient senti l’approche de… »

Tout à coup, de formidables rugissements éclatèrent autour de l’enceinte du kraal.

« Des tigres ! » s’écria le capitaine Hod, en se précipitant vers la case de Mathias Van Guitt.

Mais, telle avait été la violence de ces rugissements, que tout le personnel du kraal était déjà sur pied, et le fournisseur, suivi de ses gens, apparaissait sur la porte.

« Une attaque !… s’écria-t-il.

— Je le crois, répondit le capitaine Hod.

— Attendez ! Il faut voir !… »

Et, sans prendre le temps d’achever sa phrase, Mathias Van Guitt, saisissant une échelle, la dressa contre la palissade. En un instant, il en eut atteint le dernier échelon.