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la maison à vapeur.

D’Ourtcha, rien à dire ni à voir. C’est l’ancienne capitale du Bundelkund, une ville qui fut florissante dans la première moitié du dix-septième siècle. Mais les Mongols d’une part, les Maharates de l’autre, lui portèrent de terribles coups, dont elle ne se releva pas. Et, maintenant, l’une des grandes cités de l’Inde centrale n’est plus qu’une bourgade, qui abrite misérablement quelques centaines de paysans.

J’ai dit que nous étions venus camper sur les bords de la Betwa. Il est plus juste de dire que le train fit halte à une certaine distance de sa rive gauche.

En effet, cet important cours d’eau, en pleine crue, débordait alors de son lit et recouvrait largement ses berges. De là quelques difficultés, peut-être, pour effectuer notre passage. Ce serait à examiner le lendemain. La nuit était déjà trop sombre pour permettre à Banks d’aviser.

Il s’ensuit donc qu’aussitôt après la sieste du soir, chacun de nous regagna sa cabine et alla se coucher.

Jamais, à moins de circonstances particulières, nous ne faisions surveiller le campement pendant la nuit. À quoi bon ? Pouvait-on enlever nos maisons roulantes ? Non ! Pouvait-on voler notre éléphant ? Pas davantage. Il se serait défendu rien que par son propre poids. Quant à la possibilité d’une attaque de la part des quelques maraudeurs qui courent ces provinces, c’eût été bien invraisemblable. D’ailleurs, si aucun de nos gens ne montait la garde pendant la nuit, les deux chiens, Phann et Black, étaient là, qui nous auraient prévenus de toute approche suspecte.

C’est précisément ce qui arriva pendant cette nuit. Vers deux heures du matin, des aboiements nous réveillèrent. Je me levai aussitôt et trouvai mes compagnons sur pied.

« Qu’y a-t-il donc ? demanda le colonel Munro.

— Les chiens aboient, répondit Banks, et, certainement, ils ne le font pas sans raison.

— Quelque panthère qui aura toussé dans les fourrés voisins ! dit le capitaine Hod. Descendons, visitons la lisière du bois, et, par précaution, prenons nos fusils. »

Le sergent Mac Neil, Kâlagani, Goûmi, étaient déjà sur le front du campement, écoutant, discutant, tâchant de se rendre compte de ce qui se passait dans l’ombre. Nous les rejoignîmes.

« Eh bien, dit le capitaine Hod, n’avons-nous pas affaire à deux ou trois fauves qui seront venus boire sur la berge ?