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la maison à vapeur.

Le lendemain, 25 septembre, tandis que se faisaient les préparatifs du départ, le colonel Munro, le capitaine Hod, Mac Neil, Kâlagani et moi, nous voulûmes explorer une dernière fois la lisière de la forêt.

De la bande qui s’y était aventurée pendant la nuit, il ne restait aucune trace. En tout cas, nulle nécessité de s’en préoccuper.

Lorsque nous fûmes de retour, Banks prit ses dispositions pour effectuer le passage de la Betwa. Cette rivière, largement débordée, promenait ses eaux jaunâtres bien au delà de ses berges. Le courant se déplaçait avec une extrême rapidité, et il serait nécessaire que le Géant d’Acier lui fît tête, afin de ne pas être entraîné trop en aval.

L’ingénieur s’était d’abord occupé de trouver l’endroit le plus propice au débarquement. Sa longue-vue aux yeux, il essayait de découvrir le point où il conviendrait d’atteindre la rive droite. Le lit de la Betwa se développait, en cette portion de son cours sur une largeur d’un mille environ, Ce serait donc le plus long trajet nautique que le train flottant aurait eu à faire jusqu’ici.

« Mais, demandai-je, comment s’y prennent les voyageurs ou les marchands, lorsqu’ils se trouvent arrêtés devant les cours d’eau par de pareilles crues ? Il me semble difficile que des bacs puissent résister à de tels courants, qui ressemblent à des rapides.

— Eh bien, répondit le capitaine Hod, rien n’est plus simple ! Ils ne passent pas !

— Si, répondit Banks, ils passent, quand ils ont des éléphants à leur disposition.

— Eh quoi ! des éléphants peuvent-ils donc franchir de telles distances à la nage ?

— Sans doute, et voici comment on procède, répondit l’ingénieur. Tous les bagages sont placés sur le dos de ces…

— Proboscidiens !… dit le capitaine Hod, en souvenir de son ami Mathias Van Guitt.

— Et les mahouts les forcent d’entrer dans le courant, reprit Banks. Tout d’abord, l’animal hésite, il recule, il pousse des hennissements ; mais, prenant bientôt son parti, il entre dans le fleuve, il se met à la nage et traverse bravement le cours d’eau. Quelques-uns, j’en conviens, sont parfois entraînés et disparaissent au milieu des rapides ; mais c’est assez rare, lorsqu’ils sont dirigés par un guide adroit.