Page:Verne - Le Château des Carpathes.djvu/105

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Ils n’étaient pas trois, ils étaient quatre, et le quatrième se montra sous les traits du docteur.

« Nic… mon pauvre Nic !… s’écria la jeune fille. Nic n’est-il pas là ?… »

Si… Nic Deck était là, étendu sur une civière de branchages que Jonas et le berger portaient péniblement.

Miriota se précipita vers son fiancé, elle se pencha sur lui, elle le serra entre ses bras.

« Il est mort… s’écriait-elle, il est mort !

— Non… il n’est pas mort, répondit le docteur Patak, mais il mériterait de l’être… et moi aussi ! »

La vérité est que le jeune forestier avait perdu connaissance. Les membres raidis, la figure exsangue, sa respiration lui soulevait à peine la poitrine. Quant au docteur, si sa face n’était pas décolorée comme celle de son compagnon, cela tenait à ce que la marche lui avait rendu sa teinte habituelle de brique rougeâtre.

La voix de Miriota, si tendre, si déchirante, n’eut pas le pouvoir d’arracher Nic Deck de cette torpeur où il était plongé. Lorsqu’il eut été ramené au village et déposé dans la chambre de maître Koltz, il n’avait pas encore prononcé une seule parole. Quelques instants après, cependant, ses yeux se rouvrirent, et, dès qu’il aperçut la jeune fille penchée à son chevet, un sourire erra sur ses lèvres ; mais quand il essaya de se relever, il ne put y parvenir. Une partie de son corps était paralysée, comme s’il eût été frappé d’hémiplégie. Toutefois, voulant rassurer Miriota, il lui dit, d’une voix bien faible, il est vrai :

« Ce ne sera rien… ce ne sera rien !

— Nic… mon pauvre Nic ! répétait la jeune fille.

— Un peu de fatigue seulement, chère Miriota, et un peu d’émotion… Cela se passera vite… avec tes soins… »

Mais il fallait du calme et du repos au malade. Aussi maître Koltz quitta-t-il la chambre, laissant Miriota près du jeune forestier, qui n’eût pu souhaiter une garde-malade plus diligente, et ne tarda pas à s’assoupir.