semblaient se mouvoir dans une sorte d’infernale sarabande. Et si elles allaient s’ébranler sur leur base, dévaler le long du talus, rouler sur les deux imprudents, les écraser à la porte de ce burg, dont l’entrée leur était interdite !
Il s’était redressé, l’infortuné docteur, il écoutait ces bruits qui se propagent à la surface des hauts plateaux, ces murmures inquiétants, qui tiennent à la fois du susurrement, du gémissement et du soupir. Il entendait aussi les nyctalopes qui effleuraient les roches d’un frénétique coup d’aile, les striges envolées pour leur promenade nocturne, deux ou trois couples de ces funèbres hulottes, dont le chuintement retentissait comme une plainte. Alors ses muscles se contractaient simultanément, et son corps tremblotait, baigné d’une transsudation glaciale.
Ainsi s’écoulèrent de longues heures jusqu’à minuit. Si le docteur Patak avait pu causer, échanger de temps en temps un bout de phrase, donner libre cours à ses récriminations, il se serait senti moins apeuré. Mais Nic Deck dormait, et dormait d’un profond sommeil.
Minuit — c’était l’heure effrayante entre toutes, l’heure des apparitions, l’heure des maléfices.
Que se passait-il donc ?
Le docteur venait de se relever, se demandant s’il était éveillé, ou s’il se trouvait sous l’influence d’un cauchemar.
En effet, là-haut, il crut voir — non ! il vit réellement — des formes étranges, éclairées d’une lumière spectrale, passer d’un horizon à l’autre, monter, s’abaisser, descendre avec les nuages. On eût dit des espèces de monstres, dragons à queue de serpent, hippogriffes aux larges ailes, krakens gigantesques, vampires énormes, qui s’abattaient comme pour le saisir de leurs griffes ou l’engloutir dans leurs mâchoires.
Puis, tout lui parut être en mouvement sur le plateau d’Orgall, les roches, les arbres qui se dressaient à sa lisière. Et très distinctement, des battements, jetés à petits intervalles, arrivèrent à son oreille.