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le pays des fourrures.

sous la dénomination de « parchemins » ou de jeunes castors, suivant leur prix.

Pendant tout le mois de septembre, et jusqu’à la mi-octobre, à peu près, ces expéditions se poursuivirent et produisirent des résultats favorables.

Des blaireaux furent pris, mais en petite quantité ; on les recherchait pour leur peau, qui sert à la garniture des colliers de chevaux de trait, et pour leurs poils dont on fait des brosses et des pinceaux. Ces carnivores, — ce ne sont véritablement que de petits ours[1], — appartenaient à l’espèce des blaireaux-carcajous qui sont particuliers à l’Amérique du Nord.

D’autres échantillons de la tribu des rongeurs, et presque aussi industrieux que le castor, comptèrent pour un très haut chiffre dans les magasins de la factorerie. C’étaient des rats musqués, longs de plus d’un pied, queue déduite, et dont la fourrure est assez estimée. On les prit au terrier, et sans peine, car ils pullulaient avec cette abondance spéciale à leur espèce.

Quelques animaux de la famille des félins, les lynx, exigèrent l’emploi des armes à feu. Ces animaux souples, agiles, à pelage roux clair et tacheté de mouchetures noirâtres, redoutables même aux rennes, ne sont à vrai dire que des loups-cerviers qui se défendent bravement. Mais ni Marbre ni Sabine n’en étaient à leurs premiers lynx, et ils tuèrent une soixantaine de ces animaux.

Quelques wolvérènes, assez beaux de fourrure, furent abattus aussi dans les mêmes conditions.

Les hermines se montrèrent rarement. Ces animaux, qui font partie de la tribu des martres, comme les putois, ne portaient pas leur belle robe d’hiver, qui est entièrement blanche, sauf un point noir au bout de la queue. Leur pelage était encore roux en dessus, et d’un gris jaunâtre en dessous. Jasper Hobson avait donc recommandé à ses compagnons de les épargner momentanément. Il fallait attendre et les laisser « mûrir », pour employer l’expression du chasseur Sabine, c’est-à-dire blanchir sous la froidure de l’hiver. Quant aux putois, dont la chasse est fort désagréable à cause de l’odeur fétide que ces animaux répandent et qui leur a valu le nom qu’ils portent, on en prit un assez grand nombre, soit en les traquant dans les trous d’arbre qui leur servent de terriers, soit en les abattant à coups de fusil, quand ils se glissaient entre les branches.

Les martres proprement dites furent l’objet d’une chasse toute spéciale. On sait combien la peau de ces carnivores est estimée, quoique à un degré

  1. Les blaireaux sont tellement voisins du genre « ursus » que Linné les considérait comme une simple espèce de ce genre.