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le pays des fourrures.

« Oui ! murmura le sergent Long, c’est là le danger ! »

Tous deux revinrent alors d’un pas rapide dans l’ouest, afin de tourner l’énorme entaille, et, à partir de ce point, ils se dirigèrent directement vers le fort Espérance.

Ils n’observèrent aucun autre changement sur leur route. À quatre heures, ils franchissaient la poterne de l’enceinte et trouvaient tous leurs compagnons vaquant à leurs occupations habituelles.

Jasper Hobson dit à ses hommes qu’il avait voulu une dernière fois, avant l’hiver, chercher quelque trace du convoi promis par la capitaine Craventy, mais que ses recherches avaient été vaines.

« Allons, mon lieutenant, dit Marbre, je crois qu’il faut renoncer définitivement, pour cette année du moins, à voir nos camarades du fort Reliance ?

— Je le crois aussi, Marbre », répondit simplement Jasper Hobson, et il rentra dans la salle commune.

Mrs. Paulina Barnett et Madge furent mises au courant des deux faits qui avaient marqué l’exploration du lieutenant : l’apparition du feu, l’audition du cri. Jasper Hobson affirma que ni son sergent ni lui n’avaient pu être le jouet d’une illusion. Le feu avait été réellement vu, le cri réellement entendu. Puis, après mûres réflexions, tous furent d’accord sur ce point : qu’un navire en détresse avait passé pendant la nuit en vue de l’île, mais que l’île ne s’était point approchée du continent américain.

Cependant, avec le vent du sud-est, le ciel se nettoyait rapidement et l’atmosphère se dégageait des vapeurs qui l’obscurcissaient. Jasper Hobson put espérer, non sans raison, que le lendemain il serait à même de faire son point.

En effet, la nuit fut plus froide, et une neige fine tomba, qui couvrit tout le territoire de l’île. Le matin, en se levant, Jasper Hobson put saluer ce premier symptôme de l’hiver.

On était au 2 septembre. Le ciel se dégagea peu à peu des vapeurs qui l’embrumaient. Le soleil parut. Le lieutenant l’attendait. À midi, il fit une bonne observation de latitude, et, vers deux heures, un calcul d’angle horaire qui lui donna sa longitude.

Le résultat de ses observations fut :

Latitude : 70°57’ ;

Longitude : 170°30’.

Ainsi donc, malgré la violence de l’ouragan, l’île errante s’était à peu près maintenue sur le même parallèle. Seulement, le courant l’avait encore reportée dans l’ouest. En ce moment, elle se trouvait par le travers du détroit de Behring, mais à quatre cents milles, au moins, dans le nord du