Page:Verne - Le Pays des fourrures.djvu/420

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
410
le pays des fourrures.

Six jours après le sauvetage, les naufragés arrivaient à New-Arkhangel, la capitale de l’Amérique russe.

Là, tous ces amis, qui avaient été si étroitement attachés les uns aux autres par le danger commun, allaient se séparer pour jamais, peut-être ! Jasper Hobson et les siens devaient regagner le fort Reliance à travers les territoires de la Compagnie, tandis que Mrs. Paulina Barnett, Kalumah qui ne voulait plus se séparer d’elle, Madge et Thomas Black comptaient retourner en Europe par San Francisco et les États-Unis. Mais avant de se séparer, le lieutenant Hobson, devant tous ses compagnons réunis, d’une voix émue, parla en ces termes à la voyageuse :


« Madame, soyez bénie pour tout le bien que vous avez fait parmi nous ! Vous avez été notre foi, notre consolation, l’âme de notre petit monde ! Je vous en remercie au nom de tous ! »

Trois hurrahs éclatèrent en l’honneur de Mrs. Paulina Barnett. Puis chacun des soldats voulut serrer la main de la vaillante voyageuse. Chacune des femmes l’embrassa avec effusion.

Quant au lieutenant Hobson, qui avait conçu pour Mrs. Paulina Barnett une affection si sincère, ce fut le cœur bien gros qu’il lui donna la dernière poignée de main.

« Est-ce qu’il est possible que nous ne nous revoyions pas un jour ? dit-il.

— Non, Jasper Hobson, répondit la voyageuse, non, ce n’est pas possible ! Et si vous ne venez pas en Europe, c’est moi qui reviendrai vous retrouver ici… ici ou dans la nouvelle factorerie que vous fonderez un jour… »

En ce moment, Thomas Black, qui, depuis qu’il venait de reprendre pied sur la terre ferme, avait retrouvé la parole, s’avança :

« Oui, nous nous reverrons… dans vingt-six ans ! dit-il de l’air le plus convaincu du monde. Mes amis, j’ai manqué l’éclipse de 1860, mais je ne manquerai pas celle qui se reproduira dans les mêmes conditions et aux mêmes lieux, en 1886. Donc dans vingt-six ans, à vous chère madame, et à vous, mon brave lieutenant, je donne de nouveau rendez-vous aux limites de la mer polaire. »


fin de la deuxième et dernière partie.